Marque employeur : comment survivre à la guerre des talents ?

Stéphanie Florentin, Fondatrice du cabinet Edgar People

Stéphanie Florentin est Fondatrice et CEO de Edgar People, cabinet de recrutement spécialisé dans les métiers du digital. Elle répond aujourd’hui aux questions d’AmazingContent sur la transformation du recrutement face à la pénurie des talents.

Quelles sont les attentes des candidats envers leur futur employeur aujourd’hui ?

Les critères de sélection d’une offre qui reviennent le plus souvent sont les missions, l’ambiance interne et la rémunération. Aujourd’hui les candidats recherchent des missions dans lesquelles ils auront un réel impact, qui donnent un sens à leur travail. D’ailleurs cette recherche de sens ne se résume pas à la mission. Ils se dirigent aussi de plus en plus vers des entreprises qui ont réellement une démarche éthique, qui ont intégré la RSE à leur culture et qui ne l’utilisent pas seulement comme un joli mot dans leur communication.

Les candidats cherchent aussi à se projeter dans l’avenir, connaître les perspectives d’évolution au sein de l’entreprise. Ils sont, de plus en plus souvent, dans une démarche d’apprentissage perpétuel. Pour ça, l’entente avec le manager est aussi très importante, notamment pour les plus jeunes qui, parfois de manière un peu idéaliste, veulent à la fois être très autonomes et se sentir accompagnés dans leur progression. De plus, personne n’a envie d’être un simple exécutant. Ils se dirigent donc vers des structures qui leur permettent d’être force de proposition.

Certaines personnes nous parlent aussi de l’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle mais ce n’est pas aussi fréquent qu’on pourrait le croire en lisant la presse RH en fin de compte.

95% des candidats se renseignent sur internet avant de postuler dans une entreprise. Quelles informations recherchent-ils concrètement ?

Au minimum, ils visitent le site officiel de l’entreprise. Mais ils sont aussi de plus en plus nombreux à avoir le réflexe de regarder sa page sur LinkedIn et les plus curieux scrollent aussi le fil Twitter du/des dirigeants. Certains vont jusqu’à vérifier les dernières actualités de la société sur Google mais c’est encore rare.

La crise de confiance envers les discours institutionnels touche aussi les candidats. En entretien, beaucoup nous disent “J’aime ce que j’ai vu mais j’ai besoin de parler avec des salariés pour savoir si ce n’est pas seulement de la communication”. Les plus jeunes notamment vont lire les avis sur Glassdoor voire contacter directement des personnes qu’ils connaissent personnellement (ou non) et qui travaillent ou ont travaillé dans l’entreprise dans laquelle ils postulent.

Ce qu’ils cherchent à savoir c’est si les discours de la marque employeur sont bien appliqués en interne. Ils veulent savoir si l’ambiance est sympa, si l’entreprise est ambitieuse et si le manager est inspirant, s’il va les faire grandir et a une bonne écoute.

Selon une étude du cabinet Korn Ferry, la France devrait manquer de 1,5 millions d’employés qualifiés d’ici 2030. Qu’est-ce que ça signifie pour les entreprises ? Comment peuvent-elles s’adapter à cette pénurie des talents ?

Il n’y a pas besoin d’attendre 2030. Chez Edgar People, la pénurie des talents nous la vivons depuis au moins cinq ans sur les métiers du digital. C’est l’une des raisons pour laquelle la marque employeur a connu l’essor qu’on lui connaît et c’est certainement loin d’être terminé. On le voit à travers le succès de plateformes comme Welcome to the Jungle.

Les entreprises sont désormais obligées de s’ouvrir à de nouveaux profils, à de nouvelles formes de travail. On les a connues très frileuses sur le recrutement de freelances par exemple alors qu’aujourd’hui ils sont quasiment monnaie courante. Idem pour les reconversions, les autodidactes, etc.. Les entreprises commencent à faire preuve de plus de souplesse, aussi bien dans les personnalités recrutées que dans les modèles de contrat.

Est-ce qu’on peut, selon vous, parler d’un changement de paradigme dans la relation candidat/employeur ? Avant c’était aux candidats de convaincre l’employeur, est-ce qu’aujourd’hui ce ne serait pas plutôt l’inverse ?

C’est certainement plus équilibré même si cela reste encore un peu une action de séduction des deux côtés. Ce qui est sûr c’est qu’aujourd’hui une entreprise ou un manager qui garde une posture de “Vendez-vous !” n’a rien compris. Les entreprises qui seront les plus rapides à le comprendre sont celles qui s’en sortiront le mieux.

Cela passe par plus de souplesse dans le choix des profils et des contrats mais aussi dans le processus de recrutement. Je comprends la crainte de certains employeurs, le recrutement n’est pas une science exacte et on peut toujours faire une erreur. Mais je ne crois pas qu’on diminue le risque d’erreur en faisant passer dix entretiens. En revanche on peut perdre beaucoup de candidats.

Quel rôle le top management a-t-il à jouer dans la marque employeur aujourd’hui ?

Le top management a un rôle très important. C’est lui qui doit porter les valeurs de l’entreprise. Et cela doit transparaître dans sa communication personnelle. Les “supers candidats” sont aussi souvent ceux qui font le plus de recherches. Peut être iront-ils regarder le fil Twitter du CEO, son profil LinkedIn ou celui du responsable de Département. Ils vont chercher à comprendre la personne et la vision qu’elle porte pour l’entreprise : est-elle claire, sincère, ambitieuse, motivante ?


À propos de Stéphanie Florentin

Diplômée de l’EDHEC, après une carrière dans le Marketing, le coaching et le recrutement, Stéphanie Florentin fonde en 2014 EDGAR PEOPLE, un cabinet de recrutement spécialisé dans les métiers du digital.


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